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Quelques-unes des images les mieux résolues jamais obtenues au moyen du Très Grand Télescope de l'ESO ont pour la toute première fois permis d'assister à la transformation d'une étoile âgée en une nébuleuse planétaire prenant l'aspect d'un papillon. Ces observations de la géante rouge L2 Puppis effectuées par le nouvel instrument SPHERE positionné en mode ZIMPOL, révèlent par ailleurs l'existence d'un proche compagnon stellaire. Les étapes qui conduisent à la mort des étoiles demeurent aujourd'hui encore en partie énigmatiques pour les astronomes – notamment l'origine d'une telle nébuleuse bipolaire, en forme de sablier.
Distante de quelque 200 années-lumière, L2 Puppis est l'une des géantes rouges les plus proches de la Terre, sur le point d'entamer la phase finale de son existence. Les nouvelles observations effectuées dans le domaine visible au moyen de l'instrument SPHERE positionné en mode ZIMPOL – utilisant un système d'optique adaptative extrême, ont permis d'acquérir des images dotées d'une correction nettement supérieure à celle obtenue grâce à un système d'optique adaptative classique. De sorte que ces images laissent apparaître, à proximité de sources brillantes, des objets ainsi que des structures de faibles luminosités, à un niveau de détail bien plus élevé. Il s'agit là des premiers résultats obtenus à partir de ce mode, et des données les plus détaillées acquises sur un tel objet.
ZIMPOL est capable de produire des images dotées d'une résolution trois fois supérieure à celles acquises par le Télescope Spatial Hubble du consortium NASA/ESA. Les nouvelles observations montrent ainsi la poussière qui entoure L2 Puppis en de moultes détails [1], et viennent confirmer les résultats jadis obtenus au moyen de NACO : la poussière se distribue le long d'un disque aperçu par la tranche depuis la Terre. Les données relatives à la polarisation acquises par ZIMPOL ont par ailleurs permis à l'équipe d'ériger un modèle tridimensionnel des structures de poussière [2].
Les astronomes ont découvert que le disque de poussière débutait à quelque 900 millions de kilomètres de l'étoile – soit à une distance légèrement supérieure à celle séparant Jupiter du Soleil – et qu'il s'évasait dans la direction opposée, formant une sorte d'entonnoir symétrique autour de l'étoile. L'équipe a également repéré l'existence d'une seconde source de lumière à environ 300 millions de kilomètres de L2 Puppis – ce qui représente deux fois la distance Terre-Soleil. Cette étoile compagnon, située à très grande proximité, est vraisemblablement une autre géante rouge de masse voisine, mais d'âge moins avancé.
Le fait qu'une étoile sur le point de mourir soit entourée d'une vaste quantité de poussière, la présence d'une étoile compagnon également, constituent autant d'ingrédients nécessaires à la probable création prochaine d'une nébuleuse planétaire bipolaire. Toutefois, l'émergence d'un papillon céleste à partir de cette chrysalide poussiéreuse requiert une bonne dose de chance.
Pierre Kervella, auteur principal de cette étude, précise la difficulté du problème : “L'origine des nébuleuses planétaires bipolaires constitue l'un des principaux casse-tête de l'astrophysique moderne, notamment le processus d'éjection, dans l'espace environnant, des précieux métaux produits au sein des étoiles – une matière qui entrera dans la constitution des prochaines générations de systèmes planétaires”.
Outre le disque évasé qui entoure L2 Puppis, l'équipe a découvert l'existence de deux cônes de matière s'étirant de part et d'autre du disque, dans une direction perpendiculaire. Au sein de ces cônes figurent deux longs panaches de matière animés d'une lente rotation. L'étude des points d'origine de ces panaches a conduit à la formulation des hypothèses suivantes : l'un des panaches semble résulter de l'interaction entre la matière constituant L2 Puppis d'une part, la pression de radiation et le vent générés par l'étoile compagnon d'autre part ; l'autre panache paraît résulter d'une collision entre les vents stellaires issus de l'une et l'autre étoile, ou provenir d'un disque d'accrétion autour de l'étoile compagnon.
Bien que nos connaissances doivent encore être étendues, deux grandes théories basées chacune sur l'existence préalable d'un système d'étoiles binaire rendent actuellement compte de la formation des nébuleuses planétaires bipolaires [3]. Les nouvelles observations suggèrent que l'ensemble des processus requis sont ici à l'œuvre, renforçant la probabilité que cette paire d'étoiles donne naissance, à terme, à un papillon céleste.
Pierre Kervella de conclure : “Seules quelques années sont nécessaires à l'étoile compagnon pour décrire une orbite complète autour de L2 Puppis, façonnant par la même le disque de la géante rouge.
Nous serons en mesure de suivre l'évolution des caractéristiques du disque de poussière en temps réel – une perspective extrêmement rare et particulièrement excitante.”
Je ne sais rien avec certitude , mais la vue des étoiles me fait rêver
Vincent Van gogh